Episode 3 – AVALER LA PILULE ?

 

Avertissements

  • Médicaments
  • Grossophobie

Description de l’épisode

Si on parle peu de dépression, tout le monde a l’air d’avoir un avis sur les anti-dépresseurs. Les médicaments en santé mentale sont coincés entre des préjugés validistes (on devrait pouvoir s’en passer) et des preuves d’efficacité fragiles. Pour regarder objectivement la réalité de la prise de médicaments, Lola nous raconte sa prise de médicaments, de la première ordonnance aux effets secondaires. Capucine nous explique la complexité des alternatives.

 

Ressources et références

  • Messalina Mescalina (instagram consulté le 15/11/2022)
  • Foucault, Michel. Histoire de la folie à l’âge classique. Gallimard, 2007.
  • Lawson, Jenny. Furiously happy: {a funny book about horrible things}. First Edition, FlatironBooks, 2015.
  • Moncrieff, Joanna. The myth of the chemical cure: a critique of psychiatric drug treatment. Palgrave Macmillan, 2008.
  • Parikh, Sagar V. Le trouble bipolaire: guide d’information. Édition révisée, CAMH, Centre de toxicomanie et de santé mentale, 2015.
  • Read, Jim, et Jill Reynolds, éditeurs. Speaking Our Minds: An Anthology of Personal Experiences of Mental Distress and Its Consequences. 1. publ, The Open University [u.a.], 1996.
  • Se libérer de la psychiatrie, A quel rythme faire son sevrage, 15 juin 2021 https://selibererdelapsychiatrie.wordpress.com/2021/06/15/a-quel-rythme-faire-mon-sevrage/

La musique a été réalisée par Lilith Didier-Charlet à l’exception des morceaux suivants :

  • Frankum – Electronic loop

La Clameur Podcast Social Club est un studio de podcast associatif basé à Bordeaux.
Quelques raisons de ne pas disparaître est écrit et monté par Claire Selma. L’habillage sonore est réalisé par Lilith Didier-Charlet. Le générique ainsi que le mixage ont été réalisés par Marie-Lou HV. La production est assurée par Alizée Mandereau.

L’illustration du podcast a été réalisée par Ohmu.

Remerciements à Aziliz Peaudecerf pour sa réécoute attentive, à Anthony Dumas pour la mise en ligne et à Pauline Moszkowski-Ouargli et Lucie Pradeau pour la communication.

Transcription

Bruit d’oiseaux

Voix de Claire-Selma

Introduction

Depuis le début, je garde les boîtes de mes médicaments. Je défais leur structure cartonnée, les applatis avec la tranche de ma main et les rage sur une étagère, en petits tas désordonnés. Je me suis dit que j’avais besoin de les conserver pour appréhender quelque chose, pour rendre réel la maladie et le médicament en même temps.

Mais je crois que je les garde pour une autre raison, moins avouable. Je les garde pour pouvoir, un jour les jeter, d’un coup, quand j’en aurais fini tout ça. Je m’imagine ouvrir la poubelle et les lancer avec vigueur. Et ainsi tourner la page.

Je ressens un sentiment ambivalent pour les médicament. Pour tenter de l’éclaircir, j’ai adopté la seule stratégie que je connais : j’ai écumé les bibliothèques, lu des études scientifiques, assisté à des conférences, détaillé avec application des articles de blog. J’ai ingurgité des données, vérifié les indices de confiance, et questionné les biais. Je me suis insurgé devant des échantillons de test ridicules ou des preuves d’efficacité trop faibles. Je me suis beaucoup plains, j’ai beaucoup parlé …

Et puis j’ai pris mes médicaments.

Je les ai pris car, dans le fond, je ne suis pas sûr que l’ambivalence que je ressens par rapport aux médicaments provienne réellement de ce savoir rationnel. Quand je rêve que je jette toutes les boites de mon médicament, je ne pense pas aux études, aux colloques ou à la théorie.

Je pense au fait que, une fois par jour, je prends deux cachets discrets

qui me rappellent que

quelque chose ne va toujours pas.

Vous écoutez : Quelques raisons de ne pas disparaître

Aujourd’hui épisode 3 : avaler la pilule

Dans cet épisode vous entendrez deux histoires de prises de médicaments. Deux moments différents. Ces témoignages n’ont pas une portée sociologiques. Ils ne représentent pas le parcours des 1,8 millions d’ordonnance pour des anti-dépresseurs qui ont été réalisées en avril 2021. Ce ne sont que des histoires personnelles de traitement médicamenteux.

Là dans le fond c’est Lola. Je suis allée à sa rencontre dans son petit appartement parisien. Lola est prof, la trentaine. Et un jour, tout est devenu beaucoup plus difficile qu’avant

1. AVALER LA PILULE

Voix de LOLA, 3’

ça a commencé par le fait que j’étais très fatiguée à bout et que je supportais plus rien en fait enfin aller au travail c’était compliqué.

le métro c’était compliqué je me sentais à fleur de peau tout le temps et il y avait plein de moments que ça allait mais le moindre la moindre chose en fait déclenchait des crises haut d’angoisse ou de colère ou de larmes et et du coup j’étais tout le temps tout le temps sur les nerfs tout le temps

en fait ça allait pas trop mais moi je ne mettais pas du tout le mot de dépression dessus

je suis allée voir une gynécologue pour un problème différent qui était très gentille et avec qui je me suis un peu effondrée et elle m’a envoyé voir un médecin généraliste pour que je sois arrêtée une semaine puisqu’elle voyait que j’étais un peu à bout mais moi je pensais que j’étais juste très fatiguée

et en fait ce généraliste m’a envoyé tout de suite voir un psychiatre et que j’ai vu trois jours plus tard et quand je lui ai expliqué que j’étais très fatiguée que je j’étais un peu à bout il m’a mise sous anti dépresseur.

et donc en fait moi j’ai j’ai été sous anti dépresseur avant de mettre le mode dépression je ne sais même pas si lui il a prononcé le mot de dépression et j’avais très très peur et en fait moi j’avais très peur il a traité ça comme une urgence sans vraiment m’expliquer ce qui allait se passer.

il m’a un peu laché dans la nature avec ça et juste après j’ai retrouvé mon copain dans le train pour partir en weekend et en fait pendant tout le weekend j’étais j’étais vraiment paniqué et j’essayais à tout prix de vous trouver quelqu’un qui prenait des petits dépresseurs autour de moi pour savoir en fait pour avoir des informations

j’avais déjà vu des psychiatres avant j’avais déjà eu des phases a poster à poster je me rends compte que c’est des phases dépressives mais sur le moment j’appelais ça des passages à vide ou des moments des moments d’angoisse des moments de colère mais j’avais déjà pris des des anxiolytiques j’avais déjà pris des anti psychotiques

et en fait les antidépresseurs pour moi j’avais vraiment cette représentation d’un dépresseur comme le pire qui puisse m’arriver parce que du coup ça voulait dire que j’étais dépressive.

En écoutant Lola je me suis souvenu de mon état de sidération au moment de prendre le premier médicament psy. Comme si je vivais un passage de l’autre côté, du côté des non valides. C’était un peu absurde, car mon invalidité était évidente, mais il y a un choc à voir son nom sur une ordonnance pour une maladie psy.

Je me souviens d’avoir retenu mon souffle dans la pharmacie quand j’ai tendu mon ordonnance. Je me souviens m’être dit : la pharmacienne sait, sa collègue sait. Je me suis répété que ce n’était qu’un nom, qu’une pilule. L’angoisse ne partait pas.

Parfois je me demande si à ce moment-là, je n’ai pas eu plus peur du médicament que de la maladie. D’abord parce que la maladie je la connaissais. Elle était violente, vicieuse, me faisait voir des choses absentes et me plongeait dans des cauchemars abyssaux, mais je la connaissais. Les médicaments étaient des inconnus qui venaient s’inviter dans mon cerveau.

Vivre avec des médicaments, c’est avoir une petite voix dans sa tête qui se dit : est-ce que c’est vraiment moi ? Ces questionnements sont le prolongement de la dépression, qui nous fait, parfois, perdre de vue notre identité. Je me souviens me regarder dans le miroir et ne plus me reconnaître. Le problème c’est que cette sensation revient avec la prise de médicaments

C’est ce que décrit l’artiste Messalina Mescalina. Elle raconte comment la vie quotidienne avec des anti-dépresseur peut nous conduire à continuer à douter de nous. Si je ris : est-ce moi qui rit ou est-ce le médicament ? Si je plais à quelqu’un est-ce que c’est moi qui lui plaît ou les réactions provoquées par l’anti-dépresseur ?

Dans mon cas, je me demande si l’ambivalence par rapport aux médicaments n’est pas ancré dans un réflexe validiste : je dois être valide sans aide, humaine ou chimique. Je dois m’en sortir seul.e. L’autrice Susan Sontag dans VIH et ses métaphores, relève que le vocabulaire de la bataille est souvent utilisé pour parler de la maladie. Le corps, l’esprit repousse la maladie dans un élan vital. Quoi de plus éloigné de cet imaginaire qu’un pilulier et une alarme sur son téléphone ?

Malgré toutes nos craintes, Lola comme moi, avons pris les médicaments prescrits.

2. TATONNER

Lola

étrangement j’ai commencé à prendre les antidépresseurs dès que j’ai vu le premier psychiatre alors que je ne me sentais pas du tout en confiance.

je suis sortie de chez le psychiatre je suis allée dans le train j’ai pris mes antidépresseurs fin j’ai c’est un peu le pouvo ir de l’autorité médicale quoi enfin c’est que même si tu te sens pas en confiance et même si moi même je me disais je ne suis pas dépressive mais en même temps j’étais tellement à bout j’étais tellement fatiguée que j’avais aussi cet en fait ça me faisait très peur et

alors bien sur si on lit notre site d’exprès en utilisation on a l’impression qu’on va mourir de plein d’effets secondaires mais en réalité enfin moi enfin ma conclusion ça a été que au début les effets secondaires sont très forts et baissent progressivement et les effets positifs sont très faibles et augmentent progressivement.

ce qui fait qu’il faut quand même passer le cap de cette semaine deux semaines trois semaines ou moi j’avais des problèmes de vision je me sentais un peu la tête qui tourne j’étais très fatigué j’avais l’impression d’avoir un peu la grippe j’avais des problèmes de digestion, problèmes de sommeil donc c’est quand même enfin heureusement j’étais arrêté j’avais pas enfin j’aurais pas pu travailler je sais pas comment font les gens qui doivent travailler en comment font des enseignants c’est des presseurs parce que c’est quand même des médicaments forts et

enfin en tout cas moi ça a été assez voilà des bons effets secondaires.

LOLA

ça allait un peu mieux parce que je travaillais pas parce que j’avais pas à être responsable de quarante élèves donc forcément c’était plus facile. mais il y avait pas les effets positifs qu’on attendait donc il a augmenté les doses progressivement mais quand j’en ai discuté avec l’autre psychiatre c’était apparemment quand même assez rapide et à un moment on a atteint une dose qui était trop forte en fait etj’ai fait ce que une autre psychiatre encore a appelé plus tard à un virage d’humeur je crois où en fait

pendant une semaine j’avais l’impression que j’étais guérie du jour au lendemainje me sentais j’avais plein d’énergie je me sentais tellement émue et tellement je me rappelle plus du monde mais reconnaissant envers la vie envers les gens vers je laissais des messages vocaux de vingt minutes aux gens pour pour leur expliquer ce que j’avais traversé mais aussi que ça allait maintenant enfin et comme c’était la première fois que je prenais des antipresseurs je ne savais pas que c’était pas normal en fait et qu’on n’est pas censé d’un coup être guéri que ça ne fonctionne pas comme ça

Voix de Claire-Selma

Contrairement à Lola j’ai eu une psychiatre qui m’a expliqué calmement les choses.

Elle m’a présenté le modèle biomédical tel qu’il est appliqué en psychiatrie : la dépression, les troubles de l’humeur, seraient causé par un déséquilibre chimique dans le cerveau. Plus particulièrement par le déséquilibre d’hormones comme la fameuse sérotonine ou la neuradrénaline. Le médicament vient rééquilibrer ce niveau.

Cette même psychiatre a ajouté juste après : bon ça, c’est la théorie, mais honnêtement on ne sait pas comment les médicaments fonctionnent, la chimie du cerveau est mal connue. On observe juste qu’ils aident. Et en effet le modèle basé sur le déséquilibre chimique dans le cerveau est aujourd’hui remis en cause.

=> voix off qui récite des effets secondaires

Surtout elle m’a immédiatement parlé d’un éléments clefs des médicaments : les effets secondaires . Ils changent en fonction des médicaments et des personnes, c’est un peu la loterie. Comme le dit Lola, certains s’estompent avec le temps, d’autres se révèlent avec l’augmentation des doses.

Avant de rédiger la première ordonannce la psychiatre m’a donné le choix entre plusieurs médicaments, et m’a laissé le temps pour décider.

J’ai écumé tous les forums, le site du Vidal, j’ai appelé une de mes sœurs à la rescousse qui m’a renvoyé un guide informatif. J’ai tout lu et finalement j’ai choisi le médicament que m’a conseillé le psychiatre.

Musique légère et électronique

Lola a trouvé une nouvelle psychiatre, en qui elle a confiance, et a modifié son traitement. A l’anti-dépresseur s’est ajouté un neuroleptique aussi appelé antipsychotique.

L’équation une maladie un médicament n’est pas tout à fait vrai en santé mentale. Il y a plutôt plusieurs molécules, plusieurs symptômes regroupées en maladie et un aller-retour de test et ajustements.

LOLA

En fait une fois que j’avais l’anti dépresseur comme c’est quand même un anti dépresseur qui en général fonctionne bien mais qui est assez lourd à arrêter parce qu’il faut faire un sevrage très progressif progressif.

pour l’instant personne n’a voulu toucher un petit peu de préférence parce qu’il fonctionne il me va donc on m’a pas proposé deux ou trente idées préférées parce que je sais qu’il y a plein de formes.

pour le neuroleptique le deuxième elle m’a pas laissé de choix non plus elle m’a juste dit en fait elle m’a expliqué elle m’a expliqué que c’était un neuroleptique qui fonctionnait très bien sur beaucoup de gens mais qui sur une personne sur trois ça créait des fringales et que c’était assez aléatoire mais qu’il fallait tout de suite le repérer et dans ce cas là on changerait de neuroleptique.

le problème que j’ai eu c’est que moi ça m’a pas créé de fringale ça n’a pas changé mon appétit

mais ça a changé mon métabolisme et en fait

à sans m’en rendre compte parce que si c’était mélangé avec la reprise du travail avec plein de choses mais à un moment je suis allé voir un médecin là encore un médecin pas très très délicat parce que j’avais un problème au genou

et elle m’a fait me peser et en fait elle avait sur mon bulletin de santé un poids que j’avais à un moment où je faisais où j’étais malade et du coup j’avais perdu beaucoup de poids et elle a vu mon nouveau poids et mon ancien poids et elle m’a dit ah mais vos problèmes de genoux c’est votre prise de poids

et je lui ai dit ah oui ben là je pense que j’ai pris du poids avec la pandémie avec les médicaments je pense que j’ai pris cinq dix kilo et elle elle m’a dit ah mais non là c’est vingt kilo vous avez pris ça a été un peu violent

à entendre digérer et en fait je ne me suis pas rendu compte enfin je sais pas si c’est la manière dont je m’habille ou je sais pas ce qui s’est passé mais en fait je me suis rendu compte

et puis moi aussi je me suis dit ben lola t’es féministe tu devrais accepter ton corps tel qu’il est

pourquoi tu t’aimes pas avec vingt kilos en plus

Voix de Claire-Selma

Pour contrer un effet secondaire, il n’y a souvent pas d’autres choix que le changement de médicament. C’est une nouvelle montagne à gravir. Il faut réussir à dire : là ça ne me convient pas, que fait-on ?

La psychiatre de Lola lui a donc proposé de changer de médicaments.

Lola

quand elle m’a proposé qu’on arrête le deuxième neuroleptique d’un côté je me suis sentie soulagée parce que je me suis dit elle prend en sérieuse que je vis et le fait que la prise de poids ce soit un effet négatif que j’ai pas envie d’avoir alors que je me sentais bête de l’aborder

en même temps je me dis encore un médicament nouveau encore de ces effets secondaires encore enfin là ça faisait un an et demi quand même donc ça commençait enfin mon illusion de je prends quoi des médicaments pendant un an était parti depuis longtemps.

Et oui c’était, enfin, comme toujours c’était rassurant d’être pris en charge et d’être pris en main mais d’être pris au sérieux mais

mais je commençais à fatiguer un peu et puis y’a toujours ce truc de j’ai peur de déranger je de justifier auprès de son entourage encore un médicament que je teste parce qu’il y a encore quelque chose qui va pas parce que

3. DONNER SON AVIS

Voix de Claire-Selma

La question de l’entourage est une question complexe. La prise de médciaments est un choix personnel, qui n’a pas à être justifiée dans un sens comme dans l’autre.

Etrangement c’est un message qui a du mal à passer, car si on parle peu de dépression, les anti-dépresseurs ont l’air d’interesser tout le monde

Lola

ouais par rapport à l’entourage le nombre de personnes qui m’ont dit c’est quand même des cochonneries ces trucs où prends en mais fais attention ou voilà ces psychiatres là qui comparaissaient ça à de l’héroine ou ben ce dont je te parlais là de à une terrasse du café discuter de mon traitement avec une amie et avoir un mec qui se permet de traverser deux tables pour venir dire qui me conseille la méditation parce que ses médicaments c’est vraiment découdchonnerie enfin et tout le monde a son avis et tout le monde estime que son avis est attendu alors que c’est extrêmement intime et et sur ça mes amis proches ma famille proche ont tous eu je trouve une attitude très correcte à jamais me demander de me justifier.

et toujours avoir un rapport très dédramatiser aux médicaments de y’a une maladie et un médicament voilà quoi enfin c’est pas et puis même je sais pas mon copain par exemple il m’a c’est lui qui m’a offert un pilulier et ça ça m’a trop émue parce que c’était sa manière de m’aider de participer et puis de dire c’est pas grave quoi enfin c’est enfin ça m’a beaucoup aidée quoi

Voix de Claire-Selma

L’intrusion de l’entourage ne s’arrête pas seulement à la question des médicaments. Certains proches, souvent bien intentionné, oublient de vérifier le consentement des personnes concernées.

C’est ce qu’a vécu Capucine. Etudiante elle a passé le confinement chez ses parents en 2020, sa dépression s’est alors intensifiée. La dépression est mal diagnostiqué, alors forcément l’errence médicale est courante. En tout cas pour la mère de Capucine, il était plus probable que sa fille ait des problèmes d’énergie qu’une dépression. C’est donc naturellement qu’elle l’emmenée voir une kinésiologue.

Capucine

plusieurs fois ma mèrea souhaité m’emmener voir t alors j’ai le kinésiologue microchinésiologue

au début je l’ai allé pour pendant longtemps et même jusqu’à ouais reliativement récemment

j’y suis allé

parce que

je pense qu’elle a enfin c’est quelqu’un de très très angoissé mais qui ont plutôt de très anxieux et qui a tendance à

transmettre son angoisse pour le coup

et en fait

je crois que ça évidemment c’est ma mère ça ça l’inquiétait énormément de me voir comme ça.

et du coup bah en fait ça finissait par retransmet son anxiété sur moi et donc je devais me retrouver en posture de la rassurer par rapport à ma propre angoisse et à mes propres troubles dépressifs ou mes troubles du comportement alimentaire et donc du coup je le faisais pour la rassurer ou en tout cas pour lui donner le sentiment d’avoir agi comme elle pouvait.

Et peut être qu’il y a une part de moi aussi qui espérait que y’a un résultat.

et bon là j’avoue que la dernière fois que j’y suis allée, et pourtant c’est une dame la kinésiologue que je connais depuis un moment du coup et que j’apprécie vraiment ce qui tient, enfin qui a une bonne énergie pour le coup.

Mais oui la dernière fois j’y suis allée j’étais au bout d’un moment je me suis dit mais qu’est ce que je fous là ou je ne sais plus ce que je devais faire mais elle me demandait de faire des gestes je sais plus quoi et de dire des choses et en même temps

je crois qu’elle me donnait des espèces d’à coups ou que c’est pas mal hein évidemment mais ou c’est est ce que c’était moi qui devais le faire j’en sais plus mais j’avais en fait j’aurais beaucoup aimé avoir un complice mais je sais pas juste pour rigoler mais en fait j’étais seule et je me disais mais pourquoi tu te lèves pas et tu te lèves pas et tu te casses pas vraiment là c’est

enfin arrête tu peux pas subir un truc comme ça c’est fin c’est ridicule tu te rends compte de ce que t’es en train de faire et t’acceptes qu’on te fasse ça en fait c’est ton corps enfin et je ne lai pas fait.

mais bon juste quand on ne mange pas par exemple donc on nous donne des pierres à porter en collier il y a quelque chose de très énervant.

et où peut être d’ailleurs la détresse augmente encore d’un cran

et à partir de ce moment là je vais

j’arrête j’arrête de me soigner avec des fleurs de bach et

les pierres.

elle a fini par l’accepter je crois

4. ET SI ON ARRÊTAIT ?

Voix de Claire-Selma

Alors que faire ? Est-on réduit à choisir entre porter des colliers de pierre et prendre des médicaments qui peuvent avoir de lourds effets sécondaires ?

Capucine m’a rappelé l’essentiel : à un moment l’enjeu c’est de fonctionner. Souvent les médicaments constitue une première étape nécessaire. Ensuite et bien, le travail commence.

Capucine

et c’est je pense que c’est un truc qui permet d’assurer un peu les fonctions de base je pense que c’est un truc peut être essayer de jouer comme un garde fou pour ne pas s’enfoncer enfin pour en tout cas moins s’enfoncer parce qu’évidemment quand on ne mange pas ou qu’on mange mal ça agit sur étain quand on dort aussi quand tu se lasses pas enfin voilà c’est on peut aussi entrer dans un cercle et je pense que sans être trop handicapé par les troubles mais en fait à côté vous avez un moins bien et je me suis retrouvée à ce qu’il disent un peu ben là je vous donne je vous prescris déjà des doses qui sont très fortes et en fait il va falloir sérieusement se mettre à lutter contre la maladie.

Conclusion

Voix de Claire-Selma

Elizabeth Wurtzel, autrice de Prozac Nation conclut1 :

J’ai parfois l’impression d’être dépositaire d’un secret que je suis la seule à connaître : c’est que le Prozac, ce n’est pas aussi bien que ça. Bien sûr, je peux dire cela et toujours penser que le Prozac a sauvé ma vie et m’a sortie d’un état de dépression profond, ce qui pourrait sembler suffisant pour le considéder comme une manne des dieux. Mais après six ans sous Prozac, je sais que ce n’est pas la fin, mais le début. La santé mentale est plus complexe que n’importe quel médicament inventé par un mortel. Un médicament que ce soit le Prozac, le thorazine ou un remède old scool comme l’opium ou l’héroïne ne fonctionne que dans les limites où le cerveau l’autorise.

Et après une certaine période, une dépression bien ancrée déjouera n’importe lequel des médicaments chimiques.

Les médicament sont, peuvent, être une étape, une marche. Seuls, ils ne suffisent que très rarement. Car la dépression n’est pas juste un déséquilibre, qu’il soit au niveau du cerveau ou dans les intestins.

C’est ce que pointe le Dr Johanna Moncrief dans un ouvrage intitulé The myth of the chemical cure ou Le mythe du traitement chimique, qui interroge la place des médicaments en psychiatrie. Pour elle, le modèle biomédical centré sur le déséquiibre chimique dans le cerveau, centrée autour de la sérotonine notamment, a vécu. Les preuves sont trop faibles pour constituer un modèle statisfaisant. Le Dr Moncrief conclut qu’il faut décentrer le traitement d’un médicament agissant chimiquement dans le cerveau et se tourner vers d’autres formes de soin.

Jenny Lawson décrit quelque chose de similaire dans Furiously Happy. Elle liste ses alliées dans les négociations avec la dépression :

Voilà ce que j’ai trouvé utile : la lumière du soleil, les anti-dépresseurs, les anxiolytiques, la vitamine B, la marche, me laisser aller à la déprime quand il le fallait, boire de l’eau, regarder Dr Who, lire, dire à mon mari quand j’avais besoin d’être surveillée, faire une liste de chansons qui me font me sentir mieux

On ne le dira jamais assez, pour trouver un compromis avec la maladie, il faut des alliées nombreux et divers. A ce titre, Capucine m’a parlé d’une alliée bien spécifique, que vous avez peut-être entendu dans le fond durant son entretien. Je lui laisse le mot de la fin pour nous confier sa raison de ne pas disparaître.

Capucine

enfin j’ai adopté Liz ma chienne. c’est que j’avais pas l’habitude de faire des marchés pour marcher.

j’avais toujours d’un point un point b ce qui n’est pas toujours très agréable mais

en fait le fait de se balader et et le faire quotidiennement et avec j’allais dire quelqu’un un être en tout cas qui avec on a pas besoin de parler à qui on peut parler si on veut enfin

ben ça fait vraiment beaucoup de bien enfin de se poser un peu notre service qui vous trop de nous

sortir quand personne ne sort parce que il faut pas très beau ou il veut froid et en fait bah aller en forêt

faire plaisir ou des fois je la vois qui s’éclate.

la première fois que je suis allée au bois de vincennes avec elle c’était génial où je la voyais tellement enthousiaste pour enfin elle voyait un ruisseau et c’était trop cool elle voulait dans le ruisseau et ensuite il y avait une feuille c’était génial elle

et bon j’avais l’impression que vraiment elle savait plus où donner de la tête et que vraiment c’était trop bien quoi et courait partout et on était avec un ami qui avait aussi

et j’étais tous les trois et elle était avec ses potes et en même temps il y avait un milliard de trucs elle avait envie de faire et je me disais waouh j’étais super contente de l’avoir aussi heureuse et puis et puis je trouvais ça génial d’être est capable de méga enthousiaste parce qu’on va manger des croquettes parce qu’on va avoir une friandise minuscule par rapport à tail ta joie ou parce qu’on gratoue le ventre ou enfin si je regarde ailleurs je pense qu’en ouais ça par exemple je trouve ça un peu drôle.